Accessibilité des logiciels métiers et entrepreneuriat : le bug !

L’entrepreneuriat est un levier d’emploi pour les personnes déficientes visuelles. Le statut de travailleur indépendant handicapé (TIH) est relativement récent et encore peu connu par les entrepreneurs et les entreprises. Il représente d’ailleurs un réel intérêt pour les entreprises. Access’Lab a donc lancé une veille sur l’accessibilité technique des logiciels métiers, en partenariat avec Linklusion. L’occasion d’interroger son directeur, Olivier Arnaud-Blanchard sur les attentes de la communauté.

Le statut de travailleur indépendant handicapé (TIH) a été enfin reconnu en 2016. Aujourd’hui, quel état des lieux dressez-vous ?

C’est un des secrets les mieux gardés de la République : ce statut est mieux connu et reconnu du monde de l’entreprise grâce au travail d’influence de l’association H’up entrepreneurs[1] auprès du cabinet de l’actuel président. Depuis, les écosystèmes du handicap (associations, mission handicap des entreprises…) le prennent en compte, même si les choses avancent doucement. Néanmoins, une belle dynamique s’installe. Nous nous réjouissons que l’Agefiph[2] et nos mécènes soient à l’écoute de nos propositions, si bien qu’ils ont travaillé à nos côtés pour produire le premier programme gratuit en ligne de formation, de conseil et d’information pour les TIH[3]. Par ailleurs, sous l’effet de notre plaidoyer, nous avons obtenu la reconnaissance des TIH dans les clauses sociales de marché public.

Quels sont les grands enjeux collectifs ?

J’en compte prioritairement trois : ce qui relève de la protection sociale ; l’accès au financement ; enfin, la compensation du handicap encore insuffisante, en particulier pour les déficients visuels.

Quelles particularités identifiez-vous pour les entrepreneurs déficients visuels ?

Nous partageons le constat que 50 % de ce public est sans emploi, cette vigilance est d’autant plus forte que nos fondateurs viennent de ce milieu. Notre conviction est que l’une des clés, c’est la compensation par l’aide humaine et technique. Par exemple, si un entrepreneur déficient visuel veut réaliser un business plan sous Excel ou une présentation sous PowerPoint, donc deux outils basiques, il est confronté à des difficultés d’accès en lecture et en écriture. Les soutiens financiers pour les aides humaines lèvent partiellement les freins. Mais il reste encore une bonne marge de progrès.

Quelle est la valeur ajoutée pour Linklusion d’être partenaire d’Access’Lab ?

Historiquement, environ 30 % des entrepreneurs que nous accompagnons ont un handicap visuel. Or, nous dressons le même constat que la Fondation Valentin Haüy : il faut rendre accessibles les outils de production (gestion, vente, management…) et cela semble impossible ! Collaborer sur ce travail exploratoire sur les logiciels métiers est totalement en adéquation avec notre mission. D’une part, car cela nous permet de développer notre compréhension du sujet, ce qui nous aide à orienter les entrepreneurs formés chez nous. D’autre part, l’enjeu d’intégration est fort : l’accessibilité est un levier majeur de professionnalisation pour une communauté très en attente de considération. En conclusion, je dirais que si Access’Lab et ses partenaires se saisissent de ce sujet dit « de niche », c’est une perspective de passer à l’échelle.


[1] H’up entrepreneurs est une association qui accompagne les entrepreneurs en situation de handicap vers le succès de leur entreprise.

[2] L’Agefiph propose aides et accompagnement pour l’emploi des personnes en situation de handicap.

[3] Le programme TIH-Learning est disponible sur la chaîne YouTube de Linklusion.